Reading is sexy [NSFW]

Il y a quelques temps, une Meido d’Elite bien connue du pays des Maids m’a mis sous les yeux un bien joli doujin. Si l’ouvrage de 25 pages n’a rien pour rester dans les mémoires (hormis dans celles des Yukiistes dans mon genre), sa couverture m’a interpellé. En la regardant, je me demande : pourquoi ce dessin est-il sexy ? Ou plutôt : est-ce que le livre le rend sexy ? Il y a un mystère dans ces pages qui ajoute indéniablement quelque chose à l’image. Il était donc temps de s’arrêter sur ce fétiche un peu spécial – et je suppose qu’au pays des fétiches, on ne me le reprochera pas.

En avril dernier, Arte diffusait le docu La revanche des geeks. L’angle de ce film plutôt réussi était le suivant : les geeks du fond de la classe sont désormais au centre de toutes les attentions. Leur curiosité et leur côté un peu obsessionnel sont désormais vus comme des qualités (bon, certes, ça dépend), opposées à la stupidité et la passivité ambiante. Rien d’étonnant alors à ce que le smart & nerdy soit désormais sexy.

Côté geek, tout d’abord. Dans le vrai monde, les geeks et geekettes ne se cachent plus, et toutes sortes d’accessoires (t-shirts, sacs, cosplay…) permettent aux fans de se reconnaître au milieu de la foule. Pratique pour rencontrer quelqu’un qui ne crachera pas sur nos passe-temps bizarres. Sur le net (je veux dire, sur Tumblr), il n’est pas rare de voir des filles peu vêtues se parer d’accessoires vidéoludiques. Dans le porno japonais, les actrices jouent même à la Wii en baisant. Côté smart, pas sûr que les grosses lunettes et les appareils dentaires fassent plus recette qu’avant (mais d’ailleurs, ça existe encore les appareils dentaires, à part dans les teen movies des années 80 et 90 ?), mais pour certaines personnes, l’esprit et la culture peuvent avoir un effet quasi aphrodisiaque. Récemment, il y a un type qui l’a bien compris : Clayton Cubbit, créateur d’Hysterical Literature.

httpv://www.youtube.com/watch?v=PQuT-Xfyk3o

J’ignore si ça s’est vraiment passé comme ça, mais peut-être que ce photographe s’est dit un jour : je vais faire entrer le porno sur YouTube. Avant ça, à part 4chan, personne n’avait essayé. Mais comment faire ? On ne trouve sur YouTube que quelques vidéos de filles s’ébattant en sous-vêtements, ou de gravure idol en bikini batifolant sur la plage. Rien d’explicite, le porno (voire la nudité) étant viré sans ménagement par les modérateurs. Et bien, pour relever ce défi, il fallait être malin. Histoire de faire un coup, Clayton a donc proposé à la célèbre actrice X Stoya de lancer sa série de vidéos. La scène : une table, une chaise, une fille, un livre. Et sous la table, un sextoy. Concrètement, les filles lisent face caméra un passage d’un livre, et sous la table, le vibromasseur agit. Et les filles tentent de lire aussi longtemps que possible jusqu’à ce que l’orgasme mette fin à la lecture.

L’érotisme d’Hysterical Literature est indéniablement smart : tout d’abord, les filles sont habillées, le spectateur (ou la spectatrice) qui cherche de la peau dévoilée est donc prié de faire un effort. Ensuite, les vidéos tournent autour des dix minutes et montent en puissance (en jouissance, même) jusqu’au climax. Il peut ne rien se passer pendant bien cinq minutes. Mais courir tout de suite vers la fin ruine tout le processus. Il faut donc de la patience, et ça change de la mode gonzo, très in your face (no pun intended). Pendant ces dix minutes, on se retrouve du coup attentif au moindre tressautement, à la moindre fluctuation de la voix. En fait, on est attentif à une femme, ce qui est loin d’être la règle dans le porno. Enfin, je précise : bien sûr qu’on y est attentif en général. Mais plus au corps qu’aux réactions, qui de toute façon sont souvent exagérées (après tout, ce sont des actrices). Ici, le plaisir féminin est mis au centre, débarrassé du pénis et de la vulgarité du gonzo. Les réactions sont sincères, spontanées, incontrôlables.

Et enfin, il y a le texte. Ici, pas de « oh yeak fuck me », ni même de « kimochii », mais du Shakespeare, Jeanette Winterson, Bret Easton Ellis… Pour le coup, l’expression « branlette intellectuelle » prend tout son sens. On peut se demander si le texte choisi a un quelconque rapport avec ce qu’il se passe. Sur son Tumblr, Stoya a donné ses impressions sur le tournage de sa vidéo. Elle explique avoir choisi minutieusement le texte lu, en rapport avec des réflexions en cours chez elle. Du coup, le choix du texte, s’il est un peu réfléchi, introduit un second niveau de lecture. (…) En quelques sortes, les filles se trouvent dans la même position qu’un compositeur de bande originale qui se demande s’il doit coller aux images ou s’y opposer volontairement, en plaquant une mélodie douce sur une scène choc, par exemple. Pour touts ces raisons, Hysterical Literature est un concept unique, qui ne plaira pas à tout le monde mais mérite au moins d’être vu histoire de se faire un avis.

Je parlais brièvement de la voix, plus haut. Puisque j’essaye ici de prouver que les bouquins sont sexy, voilà une occasion : la lecture à haute voix est clairement quelque chose de sensuel. Il suffit de regarder, mais surtout d’écouter, la vidéo d’Alicia pour s’en convaincre. Et cet été, Europe 1 programmait l’émission Chaude est la nuit, où quelques têtes connues lisaient un texte érotique de leur choix. En soi, la lecture à haute voix est quelque chose d’intime, qui se partage d’abord entre parents et enfants. La douceur de cette lecture censée nous accompagner tranquillement au pays des rêves est peut-être à l’origine de ce fantasme, qui sait ? Je ne suis pas psychologue, mais ça ne m’étonnerait pas.

Enfin, plus évident, le livre réveille bien sûr le désir si son contenu s’y prête. J’ai cru entendre ces derniers mois qu’un livre un peu SM s’est vendu par camions partout dans le monde. En avril dernier, les quelques 1000 pages de l’oeuvre érotique de l’écrivain Pierre Louÿs ont recueilli moult louanges dans les médias. Côté manga, le ecchi voire le hentaï se sont désormais faits une petite place sur le marché français, comme récemment chez Kurokawa avec Nozokiana. Il y en a même pour toutes les sexualités, comme chez Taifu. Cependant, comme je ne vais pas faire un panorama de la littérature érotique à travers le monde, je trouve plus amusant de faire une petite sélection de photos et de dessins où désir et livre se rencontrent. Comme je suis un fou, voici de la 3D :

Mais bon, comme je suis quand même sur Meido-Rando, voici de la Rule 34 :

Tiens, je n’avais pas pensé aux librairies :

Sur Tumblr, toujours, on trouve des blogs avec uniquement des photos d’hommes et de femmes nu(e)s, un livre à la main. Je me demande : quels exemples connaissez-vous de fictions où le livre, la littérature, ont une place romantique ou érotique ? Sans trop réfléchir, je pensais aux Liaisons Dangereuses, mais il s’agit plus de lettres, même si cela suppose qu’elles soient lues par leurs destinataires. Et plus personnellement, trouvez-vous cet objet inspirant ou au contraire, vous laisse t-il complètement indifférent(e) ? Et si vous avez des bonnes feuilles ou des bonnes cases à partager, n’hésitez pas…
Pour finir, comme on est encouragé à mettre un lien ou deux, voici un article du même genre que j’avais écrit il y a plus de deux ans, sur un autre fantasme. Pour me suivre sur Twitter, c’est ici : @intothewired (et oui, je suis bien le même Lux que sur @losingtoday). J’espère que cet article vous aura intéressé(e)s et intrigué(e)s. A bientôt !