La Mélancolie de Axel Terizaki

(C’est surprenant comme je n’avais jamais encore osé faire ce titre.)

J’adore commencer des articles sans savoir si je vais oser cliquer sur le bouton Publier ou non à la fin. Je vous préviens, ça va probablement être déprimant pour vous, et embarrassant pour moi.

Je suis jamais pour vraiment étaler ma vie sur les Internets. C’est personnel, c’est chiant à lire, les gens en général s’en foutent. On cherche à se divertir sur Internet, à s’informer, pas à lire les plaintes de quelqu’un. C’est du coup assez frustrant d’un côté, parce qu’on a envie d’écrire, sans savoir si on va être lu. C’est l’équivalent de parler dans le vide, ou parler à un auditoire composé de groupes occupés à discuter entre eux. Il n’y a rien de mal à ça, mais c’est juste que ce n’est pas très engageant, vous en conviendrez.

Et puis il ne faut pas perdre de vue que Meido-Rando reste un blog personnel, un endroit où j’y écris ce que je veux. J’étais à vrai dire parti pour vous parler de Atelier Sophie sur PS4, et puis je ne sais pas par quelle mystère mon esprit s’est mis à réfléchir à des sujets plus vastes, plus déprimants aussi.

Il y a plein d’évènements liés à tout ça. On ne se met pas à déprimer comme ça d’un coup, et il est probable que d’ici à ce que j’aie fini cet article tout aille mieux, mais pour le moment ce n’est pas le cas.

Il y a surtout plus de changements autour de moi que je n’aimerais en voir, j’imagine. Je suis quelqu’un de très casanier. On dit tel maître tel chat, et les récents problèmes de santé de Shami m’ont fait prendre conscience à quel point j’étais comme lui. Le moindre changement dans mon environnement prend des proportions parfois problématiques. Le vrai problème c’est qu’à côté de ça j’aime aussi le changement. C’est hyper contradictoire mais je suis du genre à m’ennuyer si je reste trop sur le même jeu, la même activité. J’ai besoin de varier les plaisirs, ne pas toujours manger la même chose (contrairement à ce que les légendes racontent.)

Shami a eu une cystite. Rien de grve hein, mais sur le coup, étant tout seulà m’en occuper, c’était vraiment hyper stressant. Je ne me suis jamais autant senti désemparé. A cause de mes problèmes de vue il m’était impossible de vérifier s’il avait bien uriné (et mettre son nez dedans était hors de question) ou de lui faire prendre ses médicaments. Heureusement tout s’est bien goupillé car j’avais des amis formidables, une boulangère formidable et des parents formidables qui se trouvaient être là au bon moment. Mais ça m’a fait prendre conscience que j’étais seul. Terriblement seul, chez moi, et qu’en cas de gros pépin, je serai vraiment affreusement seul. Shami c’est mon rayon de soleil, ma machine à ronrons, le genre de chat tellement attaché à vous qu’il vous suit où vous allez dans la maison, qu’il vient vous faire des câlins alors que vous êtes assis devant le PC, que quand vous allez faire une sieste dans le canapé, il vient se blottir contre votre torse, et repose sa tête sur votre bras arpsè l’avoir léchouillé. C’est un bro. Un petit bro. Un enfant aussi. C’est pas pareil mais pour moi c’est comme ça. Vous comprendrez alors que, mis en garde par le vétérinaire que ça pourrait se reproduire, et surtout que si je n’avais pas immédiatement réagi, il aurait pu en mourir si ça avait été un blocage de la vessie. Ca m’a fait prendre conscience qu’à déjà 5 ans, Shami est mortel, comme nous tous, et ça m’a fait imaginer des trucs pas cool, comme le jour où il s’en ira pour de vrai, et je crois que j’en pleurerai toutes les larmes de mon corps et serai inconsolable pendant des mois. Riez, riez, mais c’est tout sauf fun.

Bien sûr beaucoup pourront rétorquer « Trouve-toi une copine ! » sauf que tout le monde le sait, c’est plus facile à dire qu’à faire. Les rencontres se font souvent sur des coups de chance ou des opportunités que je suis bien incapable de saisir. Mon handicap a toujours fait que dans la vraie vie sans Internet je suis comme un animal sans défense, incapable de faire le premier pas. De peur de déranger, de peur de passer pour ce que je ne suis pas. J’ai du mal à comprendre les histoires de harcèlement de rue vécues par les femmes de nos jours. Pas que je ne les croie pas, bien au contraire, mais juste que pour moi, accoster une fille dans la rue, dans un bar, pour lui demander son numéro ou juste discuter avec elle me paraît tellement inconcevable, tellement idiot, bête, tellement « pas moi » que j’ai du mal à comprendre que des mecs qui osent faire ça puissent exister. Et puis sans se mentir, je sais bien que je ne suis pas des plus attirants. Les plus sûrs d’eux diront que ça demande des efforts que je ne fais pas et me reprocheront des tonnes de choses. Ils auront raison, je ne suis juste pas en état de me défendre actuellement et je laisse donc couler. Je me suis même convaincu qu’être seul c’était mieux que mal accompagné. Ce qui est vrai en soi. Je me vois mal vivre avec quelqu’un que je n’aime pas, juste par désespoir et peur d’être seul. C’est complètement crétin et je préfère arrêter les choses si je ne sens pas la relation aller dans le bon sens. Chaque fois que j’ai cotoyé quelqu’un, parfois de près, parfois de loin, je me suis demandé « serais-je heureux avec cette personne ? » et chaque fois la réponse fut « Non. » Est-ce que je suis trop exigeant ? Probablement. Pourtant je suis capable d’aimer, en atteste l’amour que je porte à mon chat, à mes amis, à ma famille, ou même l’amour romantique que j’ai pu porter à des femmes avec qui je suis sorti ou avec qui j’ai essayé… mais je suis un être complexe, trop complexe sûrement, et j’ai trop d’exigences. Aimer, vivre en couple c’est faire des concessions que je me retrouve la plupart du temps incapable de faire. Je suis trop con pour ça, trop égoïste. Ca fait bizarre de dire ça, parce que pourtant je suis capable d’une générosité énorme sur plein de choses. J’ai participé à des tonnes de financements participatifs, j’ai aidé des amis dans le besoin sans jamais en attendre quoi que ce soit en retour, j’ai jamais hésité à payer des trucs à des amis sur un coup de tête. Rendre les gens heureux me plaît parce que je n’aime pas être entouré de gens malheureux. Dans un sens c’est égoïste. Je suis incapable de me rendre moi-même vraiment heureux.

Est-ce que je jalouse le bonheur des autres ? Non, je ne pense pas. Dans ma tête j’estime être vraiment heureux pour tous ceux que je connais, amis proches comme moins proches, qui se sont récemment mariés ou qui attendent un enfant. Ce sont des évènements incroyables et sources de bonheur, et je suis honnêtement content pour eux, même si dans un sens, ces évènements me donnent l’impression de me sentir de plus en plus éloigné de ces personnes. C’est paradoxal, non ?

Je suis ainsi plein de contrastes. J’ai besoin d’indépendance mais aussi de chercher le contact avec les autres. Je me vois mal partager mon apartement avec quelqu’un parce que j’ai besoin de mon jardin intime. J’y ai été tellement habitué que je crois que c’est ce qu’on appelle le célibat endurci. Pourtant ça a pas si mal marché que ça il fut un temps : j’ai réussi à vivre 3-4 ans sous le même toit que quelqu’un d’autre. Cela me laisse à penser que totu espoir n’est pas perdu et il n’est pas rare que je repense à ces années avec beaucoup de nostalgie. C’était loin d’être désagréable, et j’ai réussi à forger grâce à cela plusieurs amitiés que je considère aujourd’hui très importantes pour moi. Merci à ceux que j’ai hébergés quelques mois ou années dans mon appartement, je vous aime tous très fort.

Outre ces considérations sentimentales que n’importe quel célibataire de presque 35 ans se poserait, les changements se font aussi au niveau de mes activités.

Comme vous le savez probablement si vous cotoyez le milieu associatif otake, la Brigade SOS Francophone, que j’ai fondée avec l’aide d’autres merveilleuses personnes, n’est plus que l’ombre de ce qu’elle a été. On ne va pas se voiler la face hein : la faute à un non renouvellement des membres, à chacun qui a sa petite vie et qui veut passer à autre chose, qui a d’autres occupations… Tout cela est normal et naturel. Les membres d’hier qui sont partis de l’association on chacun continué leur route, mais je pense sincèrement que l’asso leur a apporté beaucoup de choses qu’ils ne réalisent probablement pas. Quand je vois tout ce que ce petit monde est devenu, je me dis que j’ai de quoi être fier. Le problème, c’est que c’est sympa d’être fier, que c’est super que grâce à cette association des gens se sont rencontrés, des couples se sont formés, des amitiés se sont crées… Mais aujourd’hui, il n’en reste plus grand chose. On fait toujours des activités àd roite à gauche, mais chaque fois cela m’apporte du stress car je suis trop attaché à cette association pour la voir décrépir et échoué dans ce qu’elle entreprend. Il y a une possibilité non nulle que je quitte l’association en 2016, ça fait des années que ça me démange. Mais chaque fois je me dis qu’après tout, une association peut très bien continuer à vivre en faisant ce qu’elle veut. Elle n’est pas fixe. On a déjà arrêté les fanzines parce que nous n’avons plus les moyens humains pour créer et vendre sur des conventions. Aujourd’hui c’est la partie activité qui n’aura bientôt plu les moyens humains de subvenir à ses besoins, on l’a bien vu à Epitanime 2016. Même si ça s’est globalement bien passé, il y avait trop de pression exercée sur les gens, qui au bout du week-end étaient lessivés et forcément, prompts à gueuler pour un oui ou pour un non alors que finalement, quand on regarde comment ça s’est passé, on peut en tirer un bilan positif. Le souci c’est que moi aussi je fatigue. Je n’arrive plus à arrondir les bords entre les gens. Gérer une association c’est aussi gérer de l’humain, et il y a des moments où, derrière mon masque de vice président/fondateur gentil et plein de compassion pour tout le monde, j’ai juste envie d’envoyer tout valser et de dire « Démerdez-vous, moi je me casse. » Ca aurait pu arriver bien plus tôt aussi, quand l’association était bourgeonnante et pleine de gens au sang vif. Mais à l’époque je n’étais pas seul à vouloir arrondir les bords, du coup ça a pas mal aidé. Aujourd’hui je suis fatigué de tout ça. Fatigué de stresser pour ce genre de choses. Le problème étant que si j’arrête ça, je sais que je me couperai de ce qui fait qu’on existe au sein d’une communauté : l’activité. Je n’écris plus beaucoup sur Meido-Rando, je n’ai plus beaucoup de présence. J’essaye de chérir mes amis les plus proches, mais je me rends compte que je suis incomplet, qu’il me manque quelque chose. C’est aussi une volonté de personne handicapée, de vouloir se sentir utile aux autres. Ca me permet de me dire que oui, les gens ont besoin de moi, moi qui suis incapable de m’occuper de mon chat en difficulté tout seul, ou qui suis incapable d’intéragir avec des inconnus en société.

J’imagine qu’il me faudrait un nouveau souffle, un phénomène similaire à Haruhi en 2006 pour me faire sentir vivant (dédicace à la VF de Metal Gear Solid) de nouveau, mais ça ne vient pas. Rien ne me passionne réellement ces derniers temps. J’aime toujours lire des mangas, regarder des animés ou jouer à des jeux vidéo, mais si vous me demandez qu’est-ce qui me passionne réellement au point où je voudrais fédérer une communauté tout autour, où je voudrais créer des choses autour ? Il n’y a rien. J’ai la désagréable impression d’avoir fait le tour de beaucoup de choses, de n’avoir plus rien à offrir. J’ai besoin de faire partie de quelque chose, de m’impliquer dans un projet et aujourd’hui cette envie est bien vide, parce que j’ai du mal à canaliser ce en quoi je peux être utile. Je l’ai bien vu avec Jonetsu l’an dernier, la convention amateur qui s’est crée autour de pas mal de gens de l’otakusphère que je fréquente. Je n’ai servi à rien ou presque, et je pense que ça a été le début d’une longue pente descendante. Si à l’époque j’avais déjà écrit sur le sujet, je me rends compte aujourd’hui encore que cela m’a probablement encore plus affecté que je ne le pensais. C’est toujours avec le recul qu’on mesure la pleine puissance des évènements, tous les historiens vous le diront.

Vous allez me dire « Et Eternity, ta nouvelle histoire, dans tout ça ? » C’est bien la seule chose qui m’empêche de sombrer dans une dépression totale. Sedeto ne s’en rend peut-être pas compte mais elle n’a pas idée du bonheur qu’elle me procure en créant des illustrations autour de ça. Si elle était là à côté de moi je lui aurais déjà fait un gros câlin pour la remercier. Le problème au final étant que je n’arrive pas à avoir de retours, si ce n’est le petit cercle de prélecteurs autour de moi. Voir les ventes et les retours de Blind Spot m’ont donné espoir que j’étais capable de parler aux gens de nouveau via mes écrits : chose que je n’ai plus connue depuis le début des années 2000, quand j’écrivais des fanfictions et que chaque nouvel écrit me valait des dizaines et dizaines de retours de gens qui trouvaient ça bien, ou pas. Avec Eternity, je n’ai hélas pas de retours ou si peu. Je ne sais même pas si ça plaît. Je ne sais même pas ce qui déplaît dans l’histoire. Je ne sais pas si c’est de la merde ou si j’ai une chance de le publier un jour. C’est en faisant tout ce travail de promotion que je me suis rendu compte que j’ai eu un bol monstre que Rosalys m’ait poussé à finir Blind Spot pour le publier. Sans ça je ne sais même pas si j’aurais eu le coeur de finir l’histoire. Peut-être serais-je encore en train d’écrire à l’heure actuelle les derniers chapitres. C’est vraiment terrible comme sensation, d’avoir l’impression d’écrire dans le vide quand on constate qu’on est pas lu. On dit bien sûr (et je suis le premier à le dire) qu’il vaut mieux écrire pour soi avant toute chose, mais je ne peux pas m’empêcher parfois de me dire qu’un peu de feedback ça serait quand même cool. Parce que faire rire, apporter le sourire, ou faire pleurer, faire ressentir tout bêtement des émotions, c’est ce qui me pousse le plus à écrire. Si je n’y arrive pas, si j’avance à l’aveugle (c’est bon vous pouvez ricaner grassement.) je suis en situation d’échec et l’échec n’est jamais agréable.

Je pense que je vais arrêter là pour le moment. Si vous avez lu jusqu’ici, alors vous avez toute ma gratitude, et je crois que j’ai encore des dettes sous forme de coca depuis le post de l’an dernier. Je n’attends de personne qu’il fasse quelque chose suite à ça. A vrai dire je ne sais même pas quoi faire à part regarder le temps qui passe et continuer ce que je fais de mieux en ce moment. Qui sait, une opportunité se présentera peut-être demain, ou dans un mois, ou dans six mois. Je reviens toujours plein de rêves dans les yeux en revenant du Japon, et partir de nouveau cette année ou l’an prochain est bien l’une des seules choses qui me pousse à aller de l’avant ces derniers temps. C’est une des seules choses avec Eternity qui me fait me dire que j’existe.

Cela ne s’est peut-être pas ressenti, mais j’ai écrit ceci avec une légère boule dans la gorge et la voix un peu tremblante. Prendre les appels téléphoniques entre deux paragraphes n’a pas été très simple ! J’espère que cela ne vous aura pas fait soupirer ou déprimer. Je suis bien conscient que je ne suis pas à plaindre, loin de là. J’ai un travail stable et bien payé, un toit où dormir, des amis qui m’aiment et de quoi manger et boire. Des luxes qu’une bonne partie de la population mondiale ne possède pas. Alors, après tout, en quoi ai-je le droit de me plaindre ? Je me dis souvent ceci, ça m’aide à prendre sur moi quand quelque chose ne va pas. Il y a sûrement plus malheureux que moi, mais ça ne veut pas dire que moi non plus, je n’ai pas le droit d’accéder au bonheur. Peut-être que j’ai juste besoin d’un coup de pouce après tous ceux que j’ai donnés. Peut-être que j’ai juste besoin d’être réconforté. Peut-être que j’ai juste besoin de me plaindre une fois par an de ce qui ne va pas dans ma vie pour me rendre compte de tout ce qui va.

Désolé de vous avoir fait subir ça, et merci d’être resté jusqu’au bout.

Je crois que j’ai besoin d’une bonne grosse (LAN) party party.